Matrimoine afro-américano-caribéen : legs et transmissions au féminin !
Projet et partenaires
Le projet 2019-2021 est intégré à la Chaire Interuniversitaire d’Études Caribéennes de l'Agence universitaire de la francophonie (AUF), dans l'axe : Mémoire collective et résilience. Il ambitionne de concevoir, alimenter et mettre en ligne une plateforme scientifique et pédagogique numérique réunissant des textes, des vidéos, une exposition photographique en réalité virtuelle, des activités pédagogiques ainsi qu’une bibliographie active et passive sur l'héritage culturel des femmes et ses usages dans la production contemporaine. Il est porté par le directeur de l’École d’Infotronique d’Haïti, Patrick Attié. Outre le financement de l'AUF, le projet a également obtenu le soutien de la Direction des affaires culturelles de Martinique (DAC) en 2020. La direction scientifique du projet est assurée par Daniel Rodrigues en collaboration avec des universitaires dans des laboratoires en Guyane, en France hexagonale ou encore au Portugal. Voir les acteurs, partenaires et territoires
Brève présentation du projet scientifique
La notion de « matrimoine » renvoie à la réhabilitation d'un terme tombé en désuétude et questionne les rapports de pouvoir qui sous-tendent la constitution du patrimoine à travers les siècles et sa préservation. Elle interroge le processus d’« invisibilisation » des apports culturels féminins.Dans le contexte caribéen, la dimension genrée de la problématique croise celle de d’un héritage socio-culturel post-colonial complexe à appréhender. Il renvoie historiquement à la mixité d’héritages culturels issus des métropoles, à des héritages culturels issus des mobilités forcées depuis l’Afrique noire et, plus tardivement, des échanges opérés au sein du bassin caribéen ou encore des « redécouvertes » des héritages culturels issus d’Afrique Noire. La notion de matrimoine « afro-américano-caribéen » vise à revaloriser des productions culturelles doublement « invisibilisées » : celles de femmes (premier niveau) et (second niveau) de productions issues de populations marginalisées par la domination coloniale. On trouve à l’intersection de ces deux processus un rapport de pouvoir spécifique qu’il conviendra d’explorer méthodiquement. Ainsi, les productions culturelles de chorégraphes, performeuses ou écrivaines afro-caribéennes réfléchissent-elles à la construction et à l’exposition de nouveaux corps de femmes « caribéens » affranchis des représentations essentialisantes et stigmatisantes généralement associées au corps des femmes noires depuis la colonisation, mais également de nouvelles relations à des modèles inspirants.Dans le cadre de cette enquête, on s’intéressera donc à la transmission de biens et représentations culturelles qui façonne l’héritage culturel des femmes artistes de la Martinique et plus globalement des Amériques. Cependant, au-delà de cet héritage comme transmission, la notion de matrimoine afro-américano-caribéen appelle également à interroger la façon dont ces héritages culturels sont réappropriés, travaillés, dans un processus de création artistique novateur appelé lui aussi à se transmettre… ou pas. Le matrimoine afro-américano-caribéen n’est pas qu’un héritage, il est également une production contemporaine dont les conditions de réalisation méritent d’être éclairées. Qu’est ce qui se joue dans la création artistique dans ces territoires ? Y-a-t-il transmission ? Qu’est ce qui est transmis ? Les problématiques des rapports sociaux de sexe, d’identité sexuée exercent-elles une influence dans la démarche artistique et plus globalement dans la création au féminin ?
Réalisations
Le travail mené a consisté à recueillir la parole des artistes et leurs portraits et à en proposer une restitution au public grâce à un protocole artistique mais également scientifique. Aussi l’approche choisie combine-t-elle portraits photos et vidéos, entretiens qualitatifs, sous la direction conjointe de professionnels (notamment de la photographe Anja Beutler) et des universitaires de l’équipe. Il s’agit également d’associer les étudiant.es de l’Université des Antilles en les impliquant dans la recherche qualitative, profitant là de l’occasion de les intéresser à la notion de matrimoine, et d’évaluer sa contemporanéité auprès d’un jeune public. Plusieurs travaux complémentaires ont donc été menés.
>> Exposition photo de Anja Beutler
Anja Beutler a conçu et réalisé une exposition de portraits de femmes artistes de l’espace afro-américano-caribéen créant avec les héritages des cultures croisées dans cette aire géographique. Cette exposition consacrée aux artistes afro-descendantes – mais pas que ! – a été mise en ligne en avril 2020. L’exposition sera prochainement proposée en version papier et en réalité augmentée ; elle offrira aux artistes et au public des possibilités d’échanges autour de photographies visant à saisir les relations souvent inattendues ou mouvantes entre les artistes, leur travail de création et leur(s) identité (s) de femmes artistes dans l’espace afro-americano-caribéen. Le concept consiste à combiner deux portraits de chaque artiste et se trouve décrit dans un document produit par la photographe et mis en ligne sur la plate-forme.
Il s’agit là de la poursuite d’un travail que la photographe Anja Beutler a entamé lors de sa participation au colloque international interdisciplinaire « DOM et francophonie. Femmes intellectuelles et artistes d’expression française : origines et constructions identitaires », sous la responsabilité scientifique de Karine Bénac-Giroux et Beya Dhraief. Ce colloque, soutenu par le Ministère des Outre-Mer, s’est déroulé à l’Université Nanterre le 31 août 2018, dans le cadre du CIRFF 2018, 8ème Congrès International des Recherches Féministes dans la Francophonie.
L’exposition de portraits des femmes participant au colloque est désormais accessible en ligne sur la plateforme.
>> Interview- portraits de femmes- artistes issues dans un premier temps des Arts du spectacle essentiellement
Il s’agit ici de voir et d’entendre les artistes se présenter dans un format court et dynamique allant à l’essentiel. Les vidéos ont été tournées et mises en ligne par la bibliothèque numérique MANIOC de l’université des Antilles, partenaire du projet. Cela favorisera leur diffusion dans le monde académique caribéen, mais également auprès du grand public. Ces vidéos sont accessibles également depuis la plateforme numérique en coopération avec Manioc.org.
Il s’agit d’interviews de :
- Karine Bénac,
- Estelle Butin,
- Joëlle Kabile,
- Annabel Guérédrat,
- Anaïs Hervouet,
- Alexandra Deglise,
- Estelle Butin,
- Josiane Antourel,
- Emilie Alves,
- Daniely Francisque,
- Nathalie Azer,
- Lucette Salibur,
- Astrid Mercier.
>> Entretiens biographiques avec des artistes femmes à la Martinique
Le projet MAAC vise non seulement à redécouvrir la notion de matrimoine mais aussi à interroger les représentations des artistes autour du matrimoine afro-caribéen, de la notion d’héritage culturel, dans une perspective a priori intersectionnelle. L’entretien biographique, en ce qu’il offre de liberté d’expression à l’enquêté, parait la méthode la plus appropriée pour approcher la complexité des parcours d’artistes, en termes de création et réflexivité sur leur propre histoire. Un corpus a déjà été constitué. Une vingtaine d’entretiens biographiques ont été réalisés par les étudiant.es sous la responsabilité de Michel Tondellier avec des artistes plus ou moins connues installées à la Martinique.
Rendez-vous sur https://matrimoine.art/ pour explorer les contenus. Bonne découverte !