Robinsonnade. L'Autre dans la « littérature jeunesse » coloniale
Cette affirmation de la chercheuse Danielle Dubois Marcoin souligne opportunément que la littérature de jeunesse - pour reprendre une formulation contemporaine - a été aussi, au 19ème siècle, dans le rapport a l'altérité, un vecteur de diffusion des clichés et des lieux communs dominants.
Les Aventures de Robin Jouet, disponibles dans Manioc, suggèrent fortement par leur titre leur appartenance au genre de la robinsonnade, récit d'aventures entraînant le héros loin de la civilisation et le confrontant à la nécessité de recourir aux seules ressources de la nature pour assurer sa survie. Ici, c'est la Guyane qui illustre cet Ailleurs inconnu...
Dans Devenir adulte et rester enfant ?: relire les productions pour la jeunesse (Presses Universitaires Blaise Pascal, 2008), Danielle Dubois Marcoin relève qu’à travers les aventures de ce jeune homme s’abandonnant à l’ivresse et la fascination de l’Amazone, l’auteur « exprime la nostalgie d’une conquête coloniale manquée par la France ». Ce livre a été publié en 1855, dans un contexte historique marqué par le contentieux territorial connu sous le nom de « Contesté franco-brésilien ».
L'auteur, Emile Carrey,député, mit plus tard ses talents d'écrivain et de voyageur au service de l'idéal colonial, dans des Récits de Kabylie : campagne de 1857 fournissant un exemple évocateur du ton de l'époque, quand l'esprit de conquête se doublait de prétentions scientifiques.
« C’est avec beaucoup de talent qu’Emile Carrey a servi l’œuvre colonisatrice de son pays tant il a dénigré nos montagnards et dit beaucoup de bien des siens. », écrit ainsi un critique algérien de l'ouvrage...
*« La robinsonnade pour la jeunesse et la question de l'altérité au 19ème siècle ». D. Dubois Marcoin, janvier 2008 (site de l'Institut français de l'éducation)