A l'origine de Guantánamo...

Après le 11 Septembre, George Bush fit de cette enclave militaire américaine au Sud-Est de Cuba une prison hors la loi pour « combattants islamistes », c'est-à-dire un non-lieu juridique échappant au droit américain, placé hors de tout cadre légal et de toute procédure de jugement. A sa suite, empêché par une opposition hostile, et peut-être aussi par son manque de résolution sur ce dossier, Obama échoua à mener à bien son projet de fermeture du site et le maintint en activité, sans toutefois y expédier de nouveaux détenus.Mais s'il évoque à nos mémoires saturées les épisodes les plus saillants – et les plus saignants – du chaos international en cours, le nom de Guantánamo renvoie avant tout à l'antagonisme plus que centenaire entre les États-Unis et Cuba, inscrit, à l'époque, dans une opposition commune et partagée à la présence espagnole.

Le portrait ci-contre est celui, peu connu, du « père » de Guantánamo, Tomàs Estrada Palma, noble figure de la guerre des Dix Ans – premier acte de la révolution cubaine contre l'occupant espagnol, entre 1868 et 1878 –, avant de s'illustrer comme l'hôte bienveillant d'un « grand frère américain » aux tendances interventionnistes naturelles et déjà soucieux de « liens spéciaux » avec son environnement immédiat.
En 1903, Tomàs Estrada Palma, en sa qualité de premier président de la République de Cuba, signa le Traité sur les relations entre les États-Unis d'Amérique et la République de Cuba. Plus qu'un traité, une liste de concessions et de renoncements ayant tous les dehors d'un chèque en blanc délivré aux USA. L'article VII dit ceci : « Pour établir les conditions qui permettront aux États-Unis de garantir l'indépendance de Cuba et de protéger son peuple, ainsi que pour sa propre défense, le Gouvernement de Cuba cédera ou louera aux États-Unis les terres nécessaires pour établir des bases navales ou charbonnières en certains points déterminés qui seront convenus avec le président des États-Unis. » Si le nom de Guantánamo n'est pas cité explicitement, un accord ultérieur, en date 16/23 février 1903, le mentionne clairement. La prolongation des bases américaines sur l'île fut actée en 1934 par un second traité signé, côté américain, par l'ambassadeur Sterling (photo).

Mais, depuis 1959, pas plus facile pour l’État cubain de recouvrer cette partie perdue de son territoire que de tirer quelque profit pécuniaire de cette occupation : il se dit que Castro, en signe de protestation, refusa toujours d'encaisser les loyers afférents à cette location contrainte, comme l'explique cette source d'information. Cet autre site de presse revient sur le « trou noir juridique » que constitue Guantánamo, non pas tant du fait de l'existence du centre de détention mais en raison de l'occupation abusive, par les États-Unis, d'une portion de territoire étranger...
A lire :
- Portraits tiré de Proceso histórico de la enmienda Platt (1897-1934), publié à La Havane en 1941.
- Traité de 1903 sur les relations entre les Etats-Unis d'Amérique et la République de Cuba, Université de Perpignan.